Depuis le 1er août dernier, le monde compte une nouvelle cryptodevise : le bitcoin cash (BCH). Issue d’une dissension dans la communauté bitcoin, la nouvelle monnaie cryptographique permettrait de faire des transactions plus rapides, à un coût moindre.

Les tensions couvent depuis deux ans ans dans la communauté bitcoin au sujet de l’évolution du « logiciel Bitcoin », rappelle le quotidien économique français Les Echos. Si tous s’entendent sur la nécessité d’augmenter la vitesse des échanges, les avis divergent férocement quant aux façons d’accroître la puissance du réseau sans en compromettre la sécurité.

FAIRE BANDE À PART

Plutôt que d’attendre un éventuel accord, un groupe a décidé de créer sa propre devise, baptisée bitcoin cash. Sa capitalisation de 7,7 milliards de dollars américains (9,6 G $CAN) en fait la troisième cryptomonnaie du monde, après le bitcoin et l’ether. Elle devra faire sa marque dans un marché qui compte déjà 830 monnaies cryptographiques pour 100 milliards de dollars américains (126 G $ CAN) de capitalisation.

Le traditionnel bitcoin (BTC) a assez bien encaissé le coup, son cours restant relativement stable à 2 710 dollars américains (3 412 $CAN) mercredi, un peu en retrait de son cours de 2 921 dollars américains (3 677 $CAN) du début de la journée. La principale raison de cette stabilité? La majorité du secteur adhère à la modification du logiciel promue par les équipes historiques du bitcoin, le SegWit2x, rapportent Les Echos. Moins ambitieuse que le projet porté par les créateurs du bitcoin cash, elle est toutefois jugée plus sûre et plus crédible. De son côté, le bitcoin cash a démarré en trombe et s’échangeait à un peu plus de 727 dollars américains (915 $CAN) mercredi, avant de chuter brutalement à 310 dollars américains (391 $CAN) quelques heures plus tard, selon coinmarketcap.com.

SOURCE DE CONFUSION

Cette scission aura bien sûr des impacts sur les utilisateurs. Ceux qui possèdent des bitcoins sur une Bourse soutenant les bitcoin cash sont aussi devenus propriétaires, mardi matin, de deux unités de bitcoin cash, explique le Financial Post. L’arrivée de cette nouvelle devise au nom fort semblable à celui du bitcoin risque d’entraîner de la confusion, ce qui exigera de bien éduquer les gens intéressés à mettre la main sur l’une ou l’autre de ces monnaies.

Dans une scission-distribution (spin off) traditionnelle, où une firme quitte son entreprise-mère, la valeur de cette dernière a tendance à diminuer d’un montant à peu près équivalent à la valeur de la jeune compagnie qu’elle ne possède plus, explique Matt Levine sur Bloomberg.com.

Or, la valeur du bitcoin s’est maintenue après la scission avec bitcoin cash. Quelqu’un qui possédait un bitcoin d’une valeur d’environ 2 700 dollars américains (3 399 $CAN) au moment de la scission détient désormais ce même bitcoin ET un bitcoin cash d’une valeur d’environ 300 dollars américains (378 $CAN).

DES DÉCOUVERTS PAYANTS

La situation est encore plus étrange dans le cas d’une vente à découvert (short sell). Rappelons que dans ce genre d’opération, X emprunte une action à Y et la vend à Z. Donc, Y détient une action, Z détient une action et X doit une action (il a donc une action dite «négative»). Au bout du compte, il n’y a donc qu’une action dans le marché (2-1=1).

Dans le cas d’une fusion ou d’une scission-distribution, celui qui détient une part négative doit fournir l’équivalent de la somme reliée à chaque action. Si l’action paie un dividende de 1 $, il doit payer 1 $. Si l’entreprise est acquise au coût de 13,50 $ l’action, il doit fournir 13,50 $. Compenser les parts négatives est nécessaire pour que le marché garde sa valeur réelle. Ainsi, lors de la scission, les détenteurs d’un bitcoin négatif auraient dû verser un bitcoin ET un bitcoin cash.

Mais Bitfinex, la plus grande Bourse de cryptodevises au monde, a décidé que la trop grande volatilité du bitcoin cash causerait un préjudice aux investisseurs si l’on exigeait qu’ils couvrent leur découvert par un bitcoin cash. Cela pourrait aussi créer une demande artificielle, laquelle doperait le prix de la nouvelle monnaie virtuelle. Bitfinex a donc décidé de ne pas tenir compte des découverts. On se retrouve donc dans une situation où 2-1=2.

La conséquence de cette décision apparaît encore plus étonnante, comme l’illustre cet exemple de M. Levine. Si certaines personnes détiennent 125 bitcoins et d’autres sont à découvert de 25 bitcoins, il y a donc 125 propriétaires d’un bitcoin, mais seulement 100 bitcoins en circulation. Impossible, donc, de remettre un bitcoin cash par personne, à moins d’exiger aux investisseurs de couvrir leur découvert et de fournir les 25 bitcoins manquants, ce que Bitfinex ne souhaitait pas faire. Bitfinex a plutôt décidé d’ignorer les découverts et de diviser 100 bitcoin cash par 125 détenteurs de bitcoin, leur remettant donc 0,8 bitcoin cash chacun.

Essentiellement, elle a donc donné de l’argent tout à fait gratuitement aux détenteurs d’un bitcoin « négatif ». Comme l’annonce a été faite le 27 juillet et que la scission n’a eu lieu que le 1er août, plusieurs ont tenté d’en profiter en ouvrant des comptes pour créer des découverts. Bitfinex a toutefois refusé de distribuer des BCH à ces utilisateurs, arguant que ces opérations contrevenaient à ses règles.

Une chose est sûre, on ne s’ennuie jamais avec le bitcoin…

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