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Des investisseurs qui ont fait leur marque sur les marchés boursiers depuis les années 1980 les scrutent maintenant avec inquiétude, rapporte L’Echo. 

David Tepper, un ancien de Goldman Sachs, Stan Druckenmiller, ex-stratège de George Soros, et Paul Singer, co-PDG d’Elliott Management, entre autres, jugent insoutenables à court terme les niveaux actuels de la Bourse de New York.

Bill Miller, PDG du fonds Legg Mason, anticipe pour sa part une consolidation après la hausse de 30 % enregistrée depuis le creux de mars dernier. Il prévoit que le S&P 500 redescendra de 4 à 5 %. Paul Singer va plus loin. « Les Bourses mondiales pourraient chuter de 50 % par rapport à leur sommet de février », craint-il. 

LES ACTIONS TROP RISQUÉES

Stan Druckenmiller en a vu d’autres. Il était avec George Soros lorsqu’ils ont « brisé la Banque d’Angleterre » en attaquant la livre sterling en 1992, il a souffert lors de l’éclatement de la bulle techno à l’aube des années 2000, il a vécu la crise de 2008 et a même failli acheter les Steelers de Pittsburgh. Pourtant, pour la première fois de sa carrière, il observe que « le risque de détenir des actions l’emporte aujourd’hui sur le gain potentiel ». 

Même Warren Buffett et Carl Icahn admettent qu’ils bouderont les actions pour un certain temps. La crainte que plusieurs partagent, y compris Jerome Powell, président de la Réserve fédérale américaine, c’est que les dommages de la pandémie sur les économies américaine et mondiale soient durables.

Or, les marchés restent très chèrement valorisés. Selon Bloomberg, les titres des sociétés du S&P 500 s’échangent en moyenne à près de 20 fois les bénéfices réalisés ces 12 derniers mois. C’est plus que la moyenne de 18 fois des dix dernières années. En Europe, les entreprises de l’indice STOXX 600 affichent un ratio proche de 17, contre une moyenne de 15 depuis 2010.

LAISSER TOMBER LES TITRES DE CROISSANCE?

Ainsi, tout se passe comme si les investisseurs comptaient sur un retour rapide des profits des entreprises, alors qu’au contraire, ils pourraient mettre un bon moment avant de revenir. 

Faut-il pour autant délaisser complètement les actions? Ce n’est pas l’avis de Jan Vergote, stratège en chef de Belfius. « Parce qu’il n’y a pas d’alternative si l’on recherche du rendement et qu’il est difficile d’anticiper le moment où les marchés auront touché leur point bas », dit-il.

Prudent, il conseille d’étaler ses investissements dans le temps. Au fil des semaines et des mois, il deviendra probablement plus aisé de lire les marchés et d’évaluer les répercussions à court et moyen terme de la crise sur les bénéfices des entreprises.

UNE REPRISE TRÈS CIBLÉE

Un article de Bloomberg offre un autre point de vue sur la question. Certains indices laissent penser que la marché correspond en fait assez bien à la situation économique actuelle, ce qui n’est pas nécessairement une bonne nouvelle. Les choix des investisseurs indiquent qu’ils pensent que la reprise sera lente dans plusieurs secteurs.

« Si les compagnies dont la valeur remonte sont celles qui ne sont pas affectées par la crise ou qui en bénéficient, ce n’est pas un très bon signe de la confiance en notre capacité de la surmonter », note Jason Thomas, PDG de Savos Investments. Il souhaiterait surtout voir les entreprises touchées par la crise se stabiliser en Bourse, ce qui est loin de se produire.

Ainsi, plutôt que d’analyser globalement les performances d’un indice, il faut le regarder plus en détail. Ned Davis Research évalue qu’environ 58 % des sociétés du S&P 500 bénéficient de la crise d’une manière ou d’une autre (bonjour Zoom!).

Or, mercredi dernier, les entreprises qui souffrent de la COVID-19 restaient environ 33 % sous leur valeur de février, lorsque l’indice était à un sommet. C’était encore pire pour des entreprises comme les lignes aériennes et les armateurs de croisières, dont certains ont vu leur valeur diminuer de plus de 70 %.

La reprise économique ne concerne donc présentement qu’un petit nombre d’entreprises, très concentrées dans les technologies et les grandes capitalisations. Le marché reflète cette tendance en ne faisant la part belle qu’à une petite portion des actions. Il faut donc rester prudent dans ses choix.