Depuis quelques années, les régulateurs canadiens et québécois ne cessent de publier et de mettre en place des projets de réformes, accroissent les exigences en conformité pour tous les intervenants de l’industrie et attrapent des « bandits ». Dans ce dernier cas, il est souvent trop tard, puisque le mal est déjà fait. Qu’on soit d’accord ou pas – et à cause desdits bandits –, les réformes et le resserrement en conformité sont là pour rester : protection des intérêts du consommateur exige.

Au Québec en particulier, les régulateurs (AMF et CSF) ont créé, entre autres, le « mois contre la fraude » et même lancé des campagnes de publicité pour sensibiliser les consommateurs aux dangers potentiels qui les guettent lorsqu’ils songent à confier leurs affaires financières à un conseiller.

Malgré tout ce branle-bas, tous ces dollars et toute cette énergie dépensés, je me pose une question depuis plusieurs mois : « Le consommateur sait-il vraiment avec qui il fait affaire ? » Malheureusement, ma réponse personnelle est « probablement pas ».

Pour expliquer ma réponse, je vais vous partager le fruit d’une réflexion personnelle que j’ai mise sur papier alors que j’attendais patiemment mon tour dans une salle d’attente d’un hôpital.

J’ai intitulé ma réflexion : l’art de compliquer et rendre confus.

Important : Les lignes qui suivent ne sont pas un jugement de valeur envers les conseillers et conseillères qui portent ces titres. Ce n’est qu’un triste constat des résultats d’une réforme des années 90.

Avant la réforme de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (LDPSV), quatre (4) titres étaient reconnus dans l’industrie de l’assurance de personnes :

– Deux titres « légaux » et/ou académiques octroyés suite à la réussite d’examens :

  • Assureur vie
  • Assureur vie agréé

– Deux titres ou statuts commerciaux :

  • Agent d’assurance vie
  • Courtier d’assurance vie

Ces titres et statuts étaient inscrits sur la carte professionnelle du conseiller et le consommateur comprenait facilement s’il faisait affaire avec un conseiller qui représentait un seul assureur ou plusieurs assureurs.

Depuis la réforme de la LDPSV, l’industrie se retrouve avec dix (10) différents titres, statuts légaux et statuts commerciaux.

En voici la liste :

– Un (1) seul titre « légal » peu importe le choix de carrière : conseiller ou conseillère en sécurité financière.

– Deux (2) titres « académiques » octroyés à la suite de la réussite d’examens :

  • Assureur vie certifié (AVC)
  • Assureur vie agréé (AVA)

– Deux (2) statuts légaux en tant « qu’inscrits » à l’Autorité des marchés financiers (AMF) :

  • Conseiller rattaché : Possibilité d’être rattaché à plus d’un cabinet
  • Conseiller autonome : Possibilité de conclure des ententes avec plus d’un assureur

– Le statut de « rattaché » comporte trois (3) sous-statuts commerciaux :

    • Rattaché-employé d’une institution financière :

– Exclusif à un assureur
– Carte d’affaires de l’employeur/assureur

    • Rattaché non employé d’un cabinet :

– Cabinet ayant conclu une entente d’exclusivité avec un assureur.
– Carte d’affaires du cabinet donnant l’impression que le conseiller et la cabinet sont indépendants.

    • Rattaché non employé d’un cabinet :

– Cabinet n’ayant pas conclu une entente d’exclusivité. et donc indépendant.
– Carte d’affaires du cabinet reflétant le réel statut indépendant du cabinet et du conseiller.

– Le statut d’autonome comporte deux (2) sous-statuts commerciaux :

    • Autonome :

– Ayant conclu une entente d’exclusivité avec un assureur, et donc ne pas confondre autonome avec indépendant.
– Carte d’affaires au nom du conseiller autonome donnant l’impression que le conseiller est indépendant.

    • Autonome :

– N’ayant pas conclu une entente d’exclusivité avec un assureur. et donc indépendant.
– Carte d’affaires au nom du conseiller.

Est-ce que vous êtes toujours là ?

Êtes-vous un peu confus ?

Est-ce que vous vous demandez ce que j’ai « fumé » pour mettre par écrit une telle réflexion? Je vous avoue qu’au départ je n’avais aucune idée que ma réflexion mènerait à ceci. Même aujourd’hui je dois bien me concentrer pour ne pas devenir confus en lisant ce texte.

D’après vous, un consommateur « normal » peut-il s’y retrouver et vraiment savoir avec quelle catégorie de conseiller il fait affaire ?

Imaginez en plus, si on ajoute les différents réseaux de distribution qui portent des noms différents, mais qui, dans les faits, ne sont qu’une seule et même institution ou groupe financier…

Pourquoi cette réflexion ? Peut-être que si les régulateurs décidaient de revoir la LDPSV, en « alignant » les « statuts légaux » avec les « statuts commerciaux », peut-être aideraient-ils les consommateurs à mieux identifier leur interlocuteur…??

Mieux reconnaitre la personne avec laquelle on fait affaire n’est-il pas un atout pour le bien-être d’un consommateur?

Planificateur financier, AVA, représentant en épargne collective et associé à Planex Solutions Financières, à Saint-Jérôme, Larry Bathurst compte plus de 32 années d’expérience dans l’industrie. Il a aussi été un des membres fondateurs et président du Regroupement indépendant des conseillers de l’industrie financière du Québec (RICIFQ).