Ouf! Quel soupir de soulagement pour plusieurs en cette période historique. En premier lieu, pour les victimes de Norbourg : certaines d’entre elles m’ont confié avoir vécu toute une gamme d’émotions depuis 5 ans. Ces investisseurs se sont sentis « bernés » au départ par la Caisse de dépôt qui a transféré à leur insu leurs avoirs entre les mains de Norbourg; ensuite, « floués et trahis » lorsqu’ils ont réalisé que tout fut décimé; « intimidées » ensuite par les propos de l’ancien président de l’AMF leur signifiant que, peu importe le résultat du procès, elle porterait la cause en appel; et finalement « ridiculisés » par la pub « Investiguez avant d’Investir », leur rappelant quotidiennement qu’ils auraient dû faire attention. Qu’ils auraient dû eux-mêmes enquêter, qu’ils auraient du savoir… Oui, ce fut pour eux un vrai chemin de croix. Ils méritent donc tous notre respect et notre admiration, et ils méritent amplement chacun des dollars qu’ils vont récupérer. Félicitations à vous!

Le second groupe à jubiler fut curieusement les intimés de ce même recours collectif. Avec ce règlement à l’amiable, jamais nous ne saurons… ce qui s’est réellement passé. Et surtout, personne ne sera coupable et imputable de quoi que ce soit! Les dirigeants de ces entités s’en tireront même pour la plupart, avec primes, promotions et beaux « parachutes bien dorés » au terme de leur mandat. Cette catastrophe bien javellisée étant loin derrière eux.

Également, un troisième groupe, que représentent les grandes institutions financières, s’en sont donné à cœur joie et en ont fait leurs choux gras, salivant à grandes dents devant la manne d’investisseurs désormais méfiants et suspicieux à l’endroit des petites firmes indépendantes.

Et un dernier — et non le moindre — qui doit bien rire dans sa barbe de prisonnier est Lacroix. Qui est sorti de prison jeudi dernier, frais comme un perce-neige et maintenant libre comme l’air. Chez nos voisins du Sud, ç’aurait été aux alentours de 2046, si vous voyez ce que je veux dire. Moins de 3 ans fermes de prison pour ce briseur de vies, pour tous les méfaits commis et ses multiples escapades mondaines qu’il s’est payées avec l’argent des investisseurs. Décidément, Madame La Marquise, tout va très bien, tout va très bien…

Toutefois, un seul groupe demeure et demeurera encore longtemps stigmatisé, et avec des cicatrises bien vivantes et définies : nous, les conseillers!

Et pourtant, c’est nous qui, lors de ce drame, étions seuls sur la ligne de feu, à écouter, à réconforter et à consoler nos clients. C’est nous qui avons dû défendre (et devons défendre encore aujourd’hui) notre réputation. Car personne n’est venu nous prêter main forte, bien au contraire. L’expression « bandit à cravate » étant désormais bien incrustée dans la mémoire collective. Et c’est finalement nous qui avons payé (à même notre fonds d’indemnisation que nous avons pourtant créé) la note de resto salée laissée par Lacroix. Repas nous laissant uniquement un goût amer et indigeste. 31 millions, méchante couenta! Facture qui, pourtant, ne nous revenait aucunement, car l’affaire est une fraude de gestionnaires, pas de conseillers. Aucun conseiller ne connaissait le plan machiavélique de Lacroix. Sinon, aucun n’aurait vendu ces fonds bidon à leurs clients. La responsabilité ne devait donc pas échoir aux conseillers.

Il serait donc en ce sens plus que temps que le FISF, dans sa forme actuelle, soit modernisé. C’est une iniquité profonde à l’égard des conseillers qui sont actuellement les seuls à en défrayer les coûts. Ce fonds fut créé par nous, et ce, bien avant la création de l’AMF. Lors de l’entrée en vigueur de la loi 188, le gouvernement a transmis tous les droits à l’AMF, et ce, en matière de gestion, de perception, de gouvernance et de prestation, mais sans nous permettre (nous, les uniques cotisants) de siéger au conseil d’administration. Donc aucun pouvoir de représentation et de décision. Ainsi, l’AMF devient ici juge et partie et se place en quelque sorte en situation potentielle de conflit d’intérêts. Pour sa défense, toutefois, l’AMF n’est aucunement responsable de cette situation et elle ne fait qu’appliquer les lois régissant le FISF. Et lorsque la loi 188 fut créée, aucun conseiller n’était présent à la table de concertation. Il serait donc plus que temps que les conseillers se mobilisent et se regroupent derrière ce projet de création d’un FISF élargi. Pour plus amples détails, je joins le mémoire [document Word] qui fut déposé la semaine dernière par un groupe de leader, et auquel le RICIFQ a donné son appui. C’est un premier pas, mais un pas dans la bonne direction, afin de rétablir un tant soit peu ce climat de confiance qui est si déficient présentement.

Bonne lecture et bonne mobilisation!

Léon

Planificateur financier, assureur vie agrée et conseiller indépendant dans la région de Montréal, Léon Lemoine compte près de 20 ans d’expérience dans l’industrie. Il fut un des membres fondateurs et président du Regroupement indépendant des conseillers de l’industrie financière du Québec. Il est père de deux enfants et un entraîneur dévoué de football amateur.

Site web du RICIFQ : www.regroupement.ca.