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Le « Podcast de l’émergence » est une série de balados visant à faire découvrir les gestionnaires émergents du Québec. Aujourd’hui : Pierre Alain Sauvé, gestionnaire de portefeuille et président d’Action valeur ajoutée.

Docteur en économie, Pierre Alain Sauvé a suivi un parcours pour le moins hors du commun, qui l’a mené du Conference Board du Canada au ministère des Finances, en passant par la Caisse fiduciaire de retraite du CN. La thèse de doctorat qu’il a présentée en 1989 y est-elle pour quelque chose?

« Elle m’a beaucoup aidé, vraiment, c’est étonnant, atteste le financier. L’analyse que j’ai élaborée m’a été tellement utile, particulièrement dans les périodes de crise économique. »

La théorie de l’investissement élaborée par M. Sauvé lors de ses études lui a permis de comprendre et d’anticiper les cycles économiques.

« Ce qui m’a fasciné, c’est la coupure qui se fait à certaines périodes du cycle entre ce que les entrepreneurs veulent faire comme dépenses d’investissement et ce que les banques sont prêtes à financer. À certains moments du cycle, les banques vont accepter de financer, alors qu’à d’autres moments, elles refusent. Cette barrière reflète bien les attentes. L’idée était de développer une théorie appuyée sur ce phénomène. »

PRÉDIRE LA RÉCESSION

En 1982, Pierre Alain Sauvé connaissait un début de carrière plutôt fracassant comme économiste au Conference Board du Canada, où il développait des modèles de prévision économique.

« On a été les premiers à prédire la récession de 1981-1982, souligne avec fierté le financier féru de macroéconomie. On avait un nouveau modèle qui était meilleur que celui de la Banque du Canada à l’époque. »

COCHER OUI, COCHER NON

Quelques années plus tard, en 1992, M. Sauvé joignait la Caisse fiduciaire de retraite du CN, « une boîte fédéraliste », qualifie l’économiste.

« Au moment du référendum de 1995, ça jouait particulièrement fort à la Caisse fiduciaire de retraite du CN et à la Caisse de dépôt. Chacune de leur côté, elles essayaient d’influencer la devise et les taux d’intérêt, un peu comme la Banque du Canada va stabiliser la devise en allant contre les mouvements, explique-t-il. Certains avaient intérêt à la stabiliser, et d’autres, à la déstabiliser. Ça me rappelait les tensions qu’il y avait dans les familles durant le référendum de 1980. »

LES CHIFFRES, AU-DELÀ DES GENS

Comme Warren Buffett, le financier préconise une approche d’investissement axée sur la valeur. « Je suis frugal de nature et défensif de par ma formation d’économiste. C’est ce qui me porte naturellement vers l’approche valeur, explique-t-il. Je préfère ce que me disent les chiffres à ce que me disent les gens. »

D’ailleurs, les décisions d’investissement de M. Sauvé reposent sur un système de valeurs codé par couleurs qu’il opère au moyen d’un tableur Excel. Ainsi, les compagnies « intouchables » apparaissent en rouge, et à l’inverse, les compagnies « approchables » apparaissent en vert. Ce système lui permet, d’un simple coup d’œil, de suivre des indicateurs autrement plus compliqués à analyser.

« 2,8 ou 2,9, je m’en fous. Il y a tellement d’informations qu’il faut que ça devienne intuitif. Il faut avoir des références rapides. »

DES HEURES POUR VENDRE ET ACHETER

Peu avare d’informations, Pierre Alain Sauvé livre quelques « trucs institutionnels » sur les moments phares de la journée pour acheter ou vendre des titres boursiers.

« ll y a des périodes qui sont propices à certaines activités. Tôt le matin, c’est le temps de consulter les données économiques pour avoir le pouls des marchés. Ensuite, il y a la frénésie des positions à vendre, entre 10 h et midi. Si on veut acheter? C’est de 14 h 30 à 15 h 30, dévoile le gestionnaire. Après le lunch, les gens sont au ralenti, alors c’est le temps d’acheter. Il y a un creux jusqu’à 15 h 30, et ensuite il y a une reprise avant la fermeture des marchés. »

UN MINIMUM POUR INVESTIR?

À quiconque désirant se tremper l’orteil dans les eaux parfois tumultueuses du marché boursier, le gestionnaire de portefeuille conseille les fonds négociés en Bourse pour leur liquidité et le fait qu’ils reproduisent les grands indices.

« Si vous avez 500 $ qu’il vous brûle d’aller dépenser dans un restaurant, pour une grosse sortie ou pour vous procurer le dernier iPhone, vous pourriez plutôt dépenser 10 $ en frais de transaction et acheter un certain nombre d’unités de l’indice canadien ou américain, illustre M. Sauvé. C’est de l’épargne qui ne fait pas mal et les résultats sont frappants. C’est comme ça qu’on épargne, qu’on se bâtit un capital. »

Et quand l’argent commence à fructifier? « C’est à ce moment qu’il est bon d’avoir quelqu’un entre l’argent et nos émotions. Un gestionnaire ou un représentant de courtier qui va freiner vos ardeurs quand c’est le temps. »

Avec la collaboration de Caroline Ethier.

Un peu plus sur Pierre-Luc Poulin et le « Podcast de l’émergence »

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Détenteur d’un baccalauréat en administration des affaires, Pierre-Luc Poulin a poursuivi sa formation à l’Institut canadien des valeurs mobilières où il a obtenu le titre de fellow (FCSI). Après avoir travaillé dans les milieux financiers et bancaires, il est devenu, en janvier 2001, formateur indépendant. Outre la finance, il enseigne également en communication et marketing et est auteur de publications sur le marketing web, Warren Buffett, ainsi que de romans.

L’idée du « Podcast de l’émergence » lui est venue au printemps 2018, à la suite d’une rencontre avec des gestionnaires de patrimoine émergents du Québec. Pierre-Luc Poulin entreprend alors de les faire découvrir au public par ce balado, mais aussi la publication du livre Québec & cie : investir grâce aux gestionnaires en émergence du Québec, qui devrait paraître en novembre 2018.