Une affaire vieille de plus de six ans sera entendue incessamment en Cour supérieure du Québec.

En effet, le cabinet montréalais Sylvestre, Fafard et Painchaud a déposé, le 31 mai dernier, une poursuite en recours collectif à l’encontre de trois sociétés de fonds communs : Fonds Mutuels CI, Gestion d’actifs CIBC et AIC Limitée.

Le cabinet les accuse d’avoir floué ses clients d’une somme qui pourrait dépasser 885 millions de dollars, selon la requête introductive d’instance dont Conseiller.ca a obtenu copie.

La cause type qui sera présentée est celle des investisseurs Claude Ravary, Gilles Girard et Gilles Legault. Mais elle touche toutes les personnes, physiques ou morales (de moins de 50 employés) résidentes du Québec qui ont été détentrices de parts d’une cinquantaine de fonds AIC, CI et Talvest (CIBC) entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2003.

En résumé, ces trois sociétés de fonds communs « ont permis que leurs chums partent avec des profits qui ne leur appartenaient pas », a indiqué Me Normand Painchaud, associé fondateur du cabinet Sylvestre, Fafard et Painchaud.

Pendant plusieurs années, AIC, CI, CIBC et d’autres sociétés de fonds communs ont fermé les yeux sur des opérations de market timing que certains de leurs gros clients privilégiés pratiquaient au détriment de l’ensemble des porteurs de parts.

Le market timing de fonds communs diffère de celui que les spéculateurs font avec des actions. Il consiste à tirer profit des écarts des cours sur les marchés boursiers internationaux en raison du décalage horaire entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord. Exercé à grande échelle et à court terme, il permet aux clients privilégiés de réaliser des gains importants sur le dos des détenteurs qui conservent leurs parts sur de longues périodes de temps, comme le conseille d’ailleurs les sociétés de fonds communs.

Ces opérations de synchronisation de marché créent d’autres effets insidieux, fait remarquer Me Painchaud. Par exemple, elles augmentent artificiellement la valeur moyenne quotidienne des fonds visés et, par ricochet, les frais de gestion de ces fonds « que les clients ordinaires ont indûment assumés », explique-t-on dans la requête.

Par ailleurs, ces transactions obligent les sociétés qui les tolèrent à maintenir des liquidités supplémentaires ou à vendre des positions à des moments inopportuns afin de couvrir le coût de rachat des parts des clients privilégiés.

Enfin, elles ont pour effet de « divertir l’attention des défenderesses de la stratégie d’investissement propre à chacun des fonds visés ».

En 2005, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO), qui avait découvert le pot aux roses, avait condamné AIC, AGF, CI, Groupe Investors et Franklin Templeton à rembourser quelque 205 millions de dollars aux investisseurs floués.

« La CVMO avait sanctionné uniquement les cinq plus grosses entreprises qui avaient permis le market timing, pour en faire des exemples », explique Me Painchaud, qui a décidé d’inclure les sociétés Mackenzie et CIBC dans la poursuite.

Mackenzie a fini par régler le litige à l’amiable, de même que Groupe Investors, Franklin Templeton et AGF. C’est pourquoi elles sont exclues du recours collectif.

AIC, CI, CIBC, de leur côté, préfèrent s’expliquer devant le tribunal.