Les pratiques en matière de rémunération et les programmes d’incitatifs « ne devraient pas encourager les conseils inappropriés ou qui ne conviennent pas aux clients », mais ce n’est pas toujours le cas, conclut un récent rapport de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels.

Fruit d’un examen mené l’an dernier par le service de la conformité de l’ACFM (MFDA en anglais), en collaboration avec l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) et d’autres autorités provinciales en valeurs mobilières, ce document passe au crible les programmes de rémunération et d’incitatifs de ses membres, pointe certaines de leurs faiblesses et établit un plan d’action pour améliorer la situation et réduire le risque de conflits d’intérêts.

« PRÉOCCUPATIONS IMPORTANTES »

Résultat : si l’Association estime « normal que les sociétés membres offrent des gratifications à leur personnel et récompensent le rendement qui contribue au succès financier de leur entreprise », elle ajoute que ces pratiques ne doivent pas se faire au détriment des consommateurs et doivent respecter en tout temps le Règlement 81-105, qui interdit aux courtiers d’offrir des incitatifs favorisant les fonds d’une société d’organismes de placement collectif (OPC) au détriment d’autres fonds.

Or, l’ACFM indique avoir relevé « divers modes de rémunération et mesures incitatives qui peuvent influer sur le comportement des représentants de courtier », dont certaines « ont soulevé des préoccupations importantes sur le plan de la réglementation ».

L’Association juge ainsi que les structures de rémunération de « quelques membres » n’étaient pas conformes à la réglementation. Plus spécifiquement, elle note que certains d’entre eux « ont offert des incitatifs qui ont favorisé des OPC exclusifs ou les fonds d’une certaine famille d’OPC par rapport à d’autres ». Elle indique par ailleurs avoir relevé des pratiques qui, à son avis, « augmentent le risque de ventes abusives et de conseils inappropriés », notamment dans le cas de « certaines structures de rémunération [qui] offraient des incitatifs supplémentaires pour recommander des fonds avec frais de souscription différés ».

Dans le premier cas, l’ACFM signale que « tous ses membres ont tenu compte des résultats de l’enquête et modifié leurs structures de rémunération pour éliminer les incitatifs favorisant les OPC exclusifs ». Dans le second cas de figure, elle dit « s’attendre à ce que les sociétés membres gèrent convenablement ces risques et envisagent de modifier leurs structures de rémunération », et prévient qu’elle continuera à les passer en revue lors de ses inspections.

LES AUTRES PRODUITS DE PLACEMENT

L’ACFM note également que même si le Règlement 81-105 ne s’applique qu’aux OPC, son examen a révélé « des préoccupations au chapitre de la rémunération et des incitatifs qui ne se limitent pas à la distribution d’OPC ». Plus précisément, elle souligne que « les courtiers reçoivent une rémunération et des avantages de la part d’émetteurs d’autres produits d’investissement, comme les titres dispensés, qui représentent une somme beaucoup plus élevée que la rétribution versée pour les organismes de placement collectif ». En matière de rémunération pour ces produits de placement, elle constate que « le courtage sur de nombreux titres dispensés est de 10 % et parfois plus ».

« Dans de nombreux cas, les types de rémunération ou d’avantages que les courtiers reçoivent pour les produits de placement divers ou les ententes d’indication de clients sont justement ceux que le Règlement 81105 interdit à l’égard des OPC », poursuit l’Association. D’une manière générale, les courtiers et représentants bénéficient de bonis de la part des sociétés émettrices de tels produits alors que plusieurs de ces avantages ne sont pas autorisés, précise l’ACFM. C’est par exemple le cas :

  • des droits sur le prospectus préalable ou des frais de diligence raisonnable;
  • des frais de participation du courtier;
  • des actions, options ou bons de souscription du capital social de la société émettrice;
  • des commissions de prime;
  • des honoraires liés au rendement;
  • des congrès de vente à l’extérieur du pays et autres récompenses.

UN PLAN D’ACTION EN CINQ POINTS

Afin d’assainir la situation, l’Association dresse un plan d’action en cinq points.

  1. Imposer des mesures d’intervention réglementaire lorsque ses membres ne respectent pas les exigences réglementaires ou les lois sur les valeurs mobilières, y compris s’ils offrent des incitatifs favorisant les OPC exclusifs.
  2. Continuer d’évaluer les pratiques en matière de rémunération et les mesures incitatives des membres ainsi que les contrôles destinés à mieux gérer les conflits par des inspections périodiques.
  3. Suivre le travail que mènent les Autorités canadiennes en valeurs mobilières au sujet des incitatifs favorisant les fonds avec frais de souscription différés, et prendre des dispositions supplémentaires s’il y a lieu.
  4. Porter à l’attention des autorités provinciales en valeurs mobilières les préoccupations concernant la rémunération et les incitatifs associés aux fonds d’investissement autres que les OPC et aux ententes d’indication de clients. L’ACFM compte aussi participer aux débats portant sur la réforme de la rémunération et sur la nécessité d’appliquer ou non les exigences du Règlement 81105 à ces autres produits.
  5. Poursuivre les efforts de collaboration avec d’autres autorités en valeurs mobilières pour comprendre les résultats de leurs travaux portant sur la rémunération et les incitatifs et travailler de concert avec elles pour régler les questions d’intérêt commun.

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