Lorsque le gestionnaire Connor O’Brien s’est associé au riche investisseur et animateur de télévision bien connu au Canada anglais Kevin O’Leary, il a dû lui faire valoir les avantages de se lancer en affaires en finance à Montréal. Aujourd’hui, la firme de M. O’Brien gère depuis Montréal Les Fonds O’Leary à l’aide d’une équipe de 40 personnes.

Le Conseil des fonds d’investissement du Québec (CFIQ) présentait ce mercredi un déjeuner-conférence, dans le cadre de son assemblée générale annuelle. Quatre conférenciers se sont adressés aux membres de l’industrie sous le thème « Entrepreneuriat en finance : opportunités et défis pour l’industrie des fonds communs de placements au Québec ».

Kevin O’Leary, l’un des « dragons » de l’émission originale Dragons’ Den, considérait en effet déménager les activités de sa nouvelle gamme de fonds à Toronto. « Notre firme, Gestion d’actifs Stanton, était déjà située à Montréal. Pour nous, la ville offre plusieurs avantages. Nous avons bénéficié également du programme fiscal du Centre Financier International (CFI) », explique M. O’brien, qui est chef des placements de Gestion d’actifs Stanton. Ce gestionnaire d’expérience explique que Montréal comporte des avantages pour une firme de gestion de sa taille. La présence de grands joueurs comme La Caisse et Fiera Capital fait en sorte que les émetteurs et les équipes de direction se déplacent. En même temps, il y a moins de firmes qu’à Toronto, et les analystes ont donc un accès plus direct.

Finance Montréal à l’affut

Pour Jean Houde, président du conseil du regroupement Finance Montréal, le milieu financier se porte bien dans la métropole. « Le fait qu’aujourd’hui, nous ayons un gestionnaire de portefeuille qui gère 80 milliards de dollars, Fiera-Natcan, est un exemple parfait d’entrepreneuriat à une grande échelle. Nous aurions besoin de trois ou quatre autres Fiera », lance cet ancien sous-ministre aux Finances du Québec.

Le regroupement Finance Montréal a fait récemment une étude avec la firme de conseil McKinsey pour situer Montréal sur l’échiquier mondial de la finance. Il ressort de cette étude que la métropole aurait intérêt à se spécialiser dans quatre secteurs-clés : (1) la retraite, (2) les logiciels reliés au secteur financier, (3) les produits dérivés et (4) les infrastructures. « Ce sont des secteurs où nous avons des atouts, mais que nous n’avons pas encore mis ensemble, pour notamment développer le marché d’exportation », dit M. Houde.

Les défis de se lancer en affaires

Le milieu de la finance est en partie dominé par des « gros noms », dont ceux des banques canadiennes, et par des firmes internationales. Pour une entreprise indépendante du Québec, cela demande des efforts additionnels pour percer. En 2007, le Groupe Cloutier a décidé de se lancer dans la distribution de fonds communs. « Lorsqu’on a consulté sur ce sujet, les gens nous ont amené beaucoup d’objections, par exemple quant aux actifs minimums à avoir et au poids de la conformité », souligne Michel Kirouac, vice-président et directeur général du Groupe Cloutier. La firme gère aujourd’hui pour deux milliards d’actifs en fonds communs. « Auprès des clients finaux, notre nom a moins de pouvoir que celui d’une grande banque par exemple, alors il faut avoir plus de courage », soutient M. Kirouac.

Les habilités pour l’entreprenariat demandent de l’expérience et pas uniquement de la formation. «Les étudiants qui terminent un diplôme en finance constatent souvent qu’il leur manque encore tout le côté « ventes », la connaissance des gens du milieu et les liens qui vont leur permettre éventuellement de se lancer en affaires », remarque Stéphane Chrétien, titulaire de la Chaire Groupe Investors en planification financière à l’Université Laval.