Il se déroule actuellement une importante consultation pancanadienne sur le droit pour les conseillers du secteur des valeurs mobilières de s’incorporer. Le groupe de travail qui la dirige veut recevoir vos commentaires à ce sujet.

Représenté au Québec par le ministère des Finances, ce groupe de travail relance une question vieille de plus de 10 ans, mais qui n’a jamais été réglée même si elle est fondamentale : les conseillers en placement et les représentants en épargne collective devraient-ils pouvoir se constituer en entreprise dans le cadre de leur travail ?

Dans de nombreuses provinces, les médecins, dentistes, comptables et juristes, entre autres, ont le droit de s’incorporer. Les agents d’assurances le peuvent aussi. L’incorporation permet de profiter d’avantages fiscaux substantiels, dont la possibilité de déduire les dépenses engagées pour gagner des revenus et de bénéficier d’un taux d’imposition plus favorable que celui des particuliers.

Des signaux contradictoires
La question n’est donc pas banale. Pourquoi la remettre sur la table ? C’est que, depuis la mise en place de la réforme de l’inscription, certaines anomalies sont apparues. Par exemple, les organismes de réglementation des valeurs mobilières ne s’objectent pas à ce que les représentants de courtiers et les conseillers puissent se constituer en personne morale, pourvu que ceux-ci remplissent leurs obligations en matière de réglementation et de responsabilisation.

L’ennui, c’est que les règles de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (MFDA) sont contradictoires. D’une part, elles permettent aux représentants de verser des commissions ou toute autre rétribution à une société non inscrite. Mais, d’autre part, elles leur interdisent de mener des activités de courtage de valeurs mobilières par l’intermédiaire d’une organisation constituée en personne morale.

Les règles de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) ont le mérite d’être plus claires : sont prohibés le transfert des commissions à une société non inscrite et la constitution en personne morale des représentants de ses membres.

L’industrie, elle, adopte une position libérale et préconise le recours aux « structures non traditionnelles » comme les sociétés principalement en raison des avantages fiscaux ou autres qui en découleraient, c’est-à-dire :

– Une structure plus efficace sur le plan fiscal, notamment en ce qui a trait à la gestion des transferts fiscaux et des débours.

– Une marge de manoeuvre pour la planification des taxes sur les opérations commerciales.

– Une planification de la relève plus efficace sur le plan fiscal.

– Des incitatifs pour le recrutement et la fidélisation du personnel.

Victimes de conditions inégales dans l’exercice de leur profession, les conseillers en placement et les représentants en épargne collective doivent, en plus, naviguer dans un environnement qui leur envoie des signaux contradictoires.

Trois options à débattre
Afin de lancer le débat, et dans l’espoir de régler cette question une fois pour toutes, le groupe de travail propose trois options que nous résumons ci-dessous, mais qui sont détaillées dans le document de consultation disponible en cliquant ici.

1. Option de l’Alberta Securities Commission (ASC) :
Le représentant doté de la personnalité morale n’aurait pas à s’inscrire, mais il devrait obtenir un permis annuel l’autorisant à fournir des services de courtage et de conseil auprès du directeur exécutif.

La proposition de l’ASC est assortie de restrictions concernant la structure de l’actionnariat semblables à celles qui s’appliquent aux professions juridique, comptable, médicale et dentaire. Ces dispositions ont récemment été modifiées en Alberta afin de permettre aux membres de la famille (conjoint ou enfant d’un professionnel dont la pratique est régie, et fiducie familiale dont tous les bénéficiaires sont des enfants du professionnel) de détenir des actions sans droit de vote d’une société professionnelle.

2. Option d’Avocis :
Pour ce qui est de la constitution des conseillers en personne morale, il ne devrait y avoir aucune restriction ni pour les administrateurs, ni pour les actionnaires, et leur participation ne serait pas limitée. Les personnes inscrites et non inscrites pourraient d’ailleurs être administrateurs ou actionnaires d’une société fournissant des services de courtage et de conseil.

Selon Advocis, qui est une association de conseillers et de planificateurs financiers, l’établissement d’exigences en matière de divulgation permettant d’évaluer l’admissibilité au statut d’actionnaire et d’exigences législatives visant à s’assurer de la compétence d’une personne inscrite permettrait d’éliminer la nécessité d’imposer des restrictions quant à la structure de l’actionnariat d’une société constituée par un représentant.

La proposition d’Advocis permettrait en outre de préserver la responsabilité et les obligations du représentant, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’une entreprise.

3. Option sur le transfert des commissions à une entreprise non inscrite :
Sous réserve de certaines conditions, permettre le versement des commissions d’un représentant directement à sa société, même si elle est non inscrite.

Des groupes de l’industrie craignent que les règles du MFDA créent des inégalités entre les représentants de fonds communs et les autres représentants de valeurs mobilières.

Ces inégalités pourraient être nivelées si l’OCRCVM modifiait ses règles et permettait aux représentants de ses membres de transférer leurs commissions à des sociétés non inscrites.

Cette troisième option a le mérite de ne pas influencer négativement le partage des responsabilités entre le représentant et ses clients ou sa société. « Elle permettrait en outre de créer des conditions équitables pour les représentants membres [du MFDA] et de l’OCRCVM », dit le groupe de travail.

Six questions
Afin d’aider le groupe de travail à mieux cerner les tenants et aboutissants des différentes options, on vous invite à répondre aux six questions suivantes. Si vous avez des commentaires qui ne sont pas couverts par ces questions, veuillez les inclure dans vos réponses.

1. Les gouvernements devraient-ils permettre à un plus grand nombre de courtiers et de conseillers inscrits de transférer leur rétribution à une entreprise non inscrite ?

2. Les gouvernements devraient-ils permettre aux représentants de courtiers et de conseillers inscrits de se doter de la personnalité morale ?

3. Dans l’affirmative, quelle option serait selon vous la plus efficace et la plus équilibrée ?

4. Devrait-on envisager d’autres dispositions ou options afin de faire en sorte que la relation juridique entre la personne inscrite et le client soit préservée et que les représentants soient suffisamment encadrés par leur courtier ou leur conseiller inscrit ?

5. Avez-vous des inquiétudes ou des commentaires en ce qui concerne les répercussions fiscales ou les obstacles réglementaires associés à chaque option ?

6. Avez-vous des inquiétudes ou des commentaires en ce qui concerne les répercussions possibles des options sur la protection des investisseurs ?

Vous avez jusqu’au vendredi 25 février 2011 pour acheminer vos commentaires au groupe de travail (les courriels sont les bienvenus). Au Québec, envoyez-les à :

François Bouchard
Directeur, Direction de l’encadrement du secteur financier
Ministère des Finances du Québec
8, rue Cook, 4e étage
Québec (Québec) G1R 0A4
Télécopieur : 418 646-5744
Courriel : francois.bouchard@finances.gouv.qc.ca